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pension de notre Camarade - Docteur Johan Vandepaer

pension de notre Camarade - Docteur Johan Vandepaer

« Transmets à Johan toute ma gratitude pour m'avoir gardé en bonne santé et mon admiration pour le combat acharné et juste qu'il a toujours mené contre le système capitaliste et pour une société solidaire et socialiste. Fraternellement, depuis Gijón, en Espagne. Mario Lada »

C’est avec la lecture de ce bel hommage qu'Amandine Linotte, coordinatrice de la maison médicale Médecine pour le peuple de Herstal, a démarré la soirée samedi 16 mai à Herstal à l’occasion de la pension de notre camarade-docteur, Johan Vandepaer.  

Johan est arrivé à Herstal en 1978 avec sa femme, la camarade Lieve Dehaes. Comme d’autres jeunes militants du PTB, Johan et Lieve ont fait le choix de travailler en usine. Une décision qui leur a permis de vivre la situation des travailleurs. Le 20 décembre 1979, a démarré la grève des médecins (soutenu par l’Ordre des Médecins). Une des rares grèves que nos 2 camarades n'ont pas soutenues. Cette grève avait pour but de protéger les intérêts (financiers) d’une certaine caste de médecins. C’est dans ce contexte de grève de soins – une situation d’urgence - que la maison médicale "médecine pour le peuple Herstal " a été crée (plus tôt que prévu).

 

Mais d’où vient cet engagement, d’où vient ce choix de se mettre du côté des travailleurs quand on est un jeune médecin ? 

Johan Vandepaer :

"Tout d’ abord la grève des mineurs au Limbourg en 1966. Ils protestaient contre la fermeture de la mine de Zwartberg. Lors d’une manifestation pacifique des mineurs et leurs familles et enfants, la gendarmerie a chargé … Plus tard la gendarmerie a tiré à balles réelles et 2 ouvriers ont été tués. Révoltant et interpellant. Dans quelle société vivons nous? une société qui n’a aucune considération pour les travailleurs qui au péril de leur santé vont chercher le charbon, source d’énergie et de richesse à l’époque. Une société, où les puissants envoient la gendarmerie avec des gaz lacrymogènes et des balles réelles contre les travailleurs? Et j’ai choisi le camp des ouvriers-mineurs. Notamment en allant travailler comme ouvrier en sidérurgie à Arcelor Mittal Chertal.

Aussi le docteur Norman Béthune, célèbre chirurgien canadien qui est partie rejoindre les antifascistes dans la guerre d’Espagne en 1936-37. Il a organisé un service mobile (avec des camionnettes réfrigérées) de transfusion sanguine, afin de sauver la vie des combattants au front. Je trouvais cela génial et inspirant : mettre les techniques médicales de pointe au service des combattants contre les puissances fascistes (Franco, Mussolini et Hitler). Après il a été rejoindre l’armée de libération de Mao en Chine, où il a apporté non seulement ses compétences chirurgicales au front, mais également organisé la formation accéléré de personnel médical (les médecins aux pieds nus). Il a été également le « père spirituel » de centre de soins intégrés (les maisons médicales) et de leur financement au forfait."

 

Servir le Peuple au quotidien qu’est-ce que cela veut dire?

Johan Vandepaer :

"J’aurais pu faire carrière comme tout médecin classique, mais j’ai fait le choix de vivre comme tout le monde avec un salaire de travailleur et dans un quartier populaire de Herstal. En fait « servir le peuple » au quotidien cela veut dire utiliser ses connaissances apprises à l’université pour faire avancer les gens, en tant que personnes et en tant que collectivité.

Je me souviens de deux familles nombreuses modestes au début de ma carrière comme médecin généraliste à Herstal. Ils étaient mal (et pas très salubre) logés avec trop peu d’espace avec toutes sortes de conflits familiaux comme conséquence. La santé ce n’est pas seulement les gènes, mais surtout des facteurs d’environnement (famille, habitation, travail). Donc j’ai fait appel – avec insistance - aux responsables de la société de logement afin de trouver une habitation sociale approprié pour ces familles. Avec succès.

Il y a eu des interventions qui dépassent le cadre familial des patients. Par exemple, début des années 90, j’ai eu à ma consultation 2 patients qui travaillent à Fiberglas, une usine à Battice dans le pays de Herve qui fabriquait de la fibre de verre (notamment certains panneaux de carrosserie de Citroën). Ces patients avaient mon âge et à la fin de la journée de travail ils étaient complètement exténués. Pas normal !

Je les ai interrogés sur les conditions de travail et il y avait un gros souci. En même temps, un de mes stagiaires-médecins avait un membre de la famille qui travaillait aussi à cette usine (dans le « tunnel ») et il se plaignait aussi des conditions de travail. De fil en aiguille, avec ces patients, on a pris contact avec la délégation syndicale de l’usine qui nous a envoyé une trentaine de travailleurs que nous avons interrogés et examinés. Et leur histoire était concordante: il y avait bien un problème de produits chimiques lié à la production de la fibre de verre. Finalement, on avait appris que Fiberglas produisait de la fibre de verre en Suède et en France avec des outils plus modernes et moins polluants pour les travailleurs. Avec toutes ces données Médecine pour le Peuple a sorti une brochure que nous avons vendue à l’entrée de l’usine.

La direction s’est vue obligée d’organiser des réunions pendant les heures de travail dans toutes les équipes pour répondre à notre brochure. Résultat: des investissements dans des outils moins polluants, et très probablement que notre action a contribué à maintenir l’emploi à l’usine.

Médecine pour le peuple parle souvent d’empowerment (donner aux gens les éléments pour qu’ils deviennent acteurs du changement et qu’ils se mettent en marche). Notre action concernant Fiberglas en est un bel exemple. Si l’on sensibilise et organise les gens, on peut obtenir des victoires.

Un autre exemple c’est l’ordre des médecins. Depuis 1979 – la grève des médecins- les médecins de médecine pour le peuple (et d’autres, en tout 300) refusent de payer la cotisation à cet organisme, qui défend une éthique d’une autre époque. En 1984, l’ordre a envoyé les huissiers pour récupérer la cotisation par une saisie de nos meubles, quand on habitait rue Louis Demeuse. Mais c’était sans compter que nos patients n’allaient pas laisser faire. Une manifestation à été organisée devant notre appartement. Nous avons également occupé notre maison médicale. Cela nous a permis de manger tous ensemble une paella géante, préparée par nos patients espagnols, dont la majorité avait fui le régime de Franco et qui ne pouvaient pas laisser la justice bourgeoise attaquer leurs médecins. J’ ai donc pu garder mes meubles.

Je pourrais vous parler également de notre action pour l’application du modèle Kiwi : en 2005 nous avons récolté à notre maison médicale plusieurs milliers de signatures pour une pétition qui réclamait une autre politique du médicament : un système d’appel d’offres afin de diminuer le prix des médicaments pour la sécurité sociale et pour les patients."

 

Ton action ne s’est pas limité à notre pays, puisque tu es parti en 1994 en mission au Rwanda après le génocide.

Johan Vandepaer :

"Je ne vais pas m’étendre sur cette mission car je veux surtout parler de toutes et tous les autres camarades qui sont partis dans différents pays du tiers monde dans un esprit d’internationalisme. Plus particulièrement mon compagnon à l’université Michael Dewitte qui est parti comme médecin au Salvador – sous le nom de Sebastian - dans les années 80 pour aider la guérilla et qui a été tué pendant son service. Notre maison médicale à Genk s’est inspiré de son esprit et s’appelle « centre de soins Michael Dewitte ».

Notre camarade Hans Krammisch a fait parti d’une mission médicale en Palestine fin des années 80.

En 1992, Lieve Dehaes et Jilali Laouej ont participé à une mission pendant la première guerre en Irak (guerre pour le pétrole), avec des scientifiques Nord-Américains pour mesurer l’impact de la guerre sur la santé de la population." 

 

Comment conçois-tu l’avenir ?

Johan Vandepaer :

"Par rapport aux années 70-80 quand j’ai débuté comme médecin, les actions pour une médecine accessible et une sécurité sociale digne de ce nom sont plus nécessaires qu’à l’époque. La Ministre libérale Maggy Deblock (médecin généraliste) diminue le remboursement de certains médicaments indispensables pour donner plus aux firmes pharmaceutiques et elle s’oppose aux forfait et attaque l’existence des maisons médicales. Je suis très confiant et fier de la nouvelle génération de notre maison médicale qui s’est rendue à plusieurs reprises devant le cabinet de cette ministre Maggy Deblock pour contester ses mesures et pour défendre une médecine accessible à tous. Ou encore quand nous sommes partis à Maastricht au printemps 2017 pour défendre le modèle Kiwi.

Un autre libéral et aussi médecin c’est le ministre des pension, Mr. Bacquelaine, prépare une réforme des pensions. Il parle de réforme, mais c’est en fait une attaque en règle contre le système de pension que les partenaires sociaux ont établi depuis 1944, depuis la création de notre système de sécurité sociale.

Il veut nous faire travailler plus longtemps jusque 67 ans pour moins de pension et instaurer un système de pension à points. Points qui seront déterminés notamment par l’âge moyen de la population, l’état des finances publiques et dont on ne connaît pas la valeur à l’avance, c’est une sorte de lotto. Dans les pays où un tel système a été instauré, les travailleurs sont contre, parce que la pension à points signifie moins de pension… Ici aussi les travailleurs de santé de médecine pour le peuple sont à l’avant-plan de la lutte."

 

Tu es pensionné mais ton engagement ne s’arrête pas. 

Damien Robert, président de province :

"Johan a été très actif dans la section du PTB Herstal pour la récolte des enquêtes qui va nous permettre d’élaborer notre programme d’action pour les élections communales. Je voudrais d’ ailleurs profiter de cette occasion pour remercier- au nom de la direction provinciale- Johan et aussi tous les camarades de la première génération."

 

Remerciements pour les différentes prises de paroles :

Paula Hertogen qui a été coordonnatrice de la maison médicale de 1990 à 2008.

Kris Hertogen: patients de Johan et qui a été président de la province et diriger la campagne électorale de 2000 date à laquelle Johan est entré (avec Nadia) au conseil.

Anne-Marie Baltasart: ex permanente CNE et ex- conseillère communale Écolo

Cayetano Carbonero: patient de Johan et ancien responsable du PC Espagnol en Belgique 

Céline Mendels Flandre: médecin à médecine pour le peuple Herstal.

Damien Robert: président de province et conseiller communal à Seraing.